Missions sportives à la radio : le sport reste à l'antenne
16 avril 2020« L’été 2020 devait être l’été de tous les exploits sportifs. Finalement, ce sera l’été du vide », déclare Vincent Rodriguez, de Radio France, déplorant le report des éditions 2020 du Tour de France, du tournoi de Roland Garros, de l’Euro de football, des Jeux olympiques et paralympiques et des Championnats d'Europe d’athlétisme en salle, parmi d’autres grandes compétitions.
Vincent Rodriguez est membre d’un groupe de radiodiffuseurs d’Europe et d’ailleurs qui participent à l’Eurovision Sport Radio Podcast – Spécial COVID-19, mis en place par David Naert, de la VRT (Belgique).
Mais les nouvelles ne sont pas toutes mauvaises. Dans le domaine des émissions sportives comme ailleurs, la crise du coronavirus a notamment eu pour effet de mettre en lumière l’ingéniosité et la polyvalence des journalistes et des autres professions de la radio. « Tous les journalistes sportifs ont été réaffectés à la couverture de l’actualité du Covid-19 » explique Lars Brøndum Nielsens de DR (Danemark), avant d’ajouter : « Dans ces circonstances inédites, il est clair que nous sommes une grande famille dans laquelle nous savons coopérer. »
Pour Christophe Mallet, de SBS (Australie), la crise a stimulé l’imagination et la créativité des professionnels du sport à la radio : « Si vous m’aviez demandé, il y a quelques mois, si chacun d’entre nous pourrait produire quotidiennement des contenus sportifs avec des entretiens, des émissions en direct et autres, je vous aurais répondu que ce serait impossible. Aujourd’hui, c’est possible, tout simplement parce que nous n’avons pas le choix ! »
« Depuis quelques années, nous ne sommes plus seulement des spécialistes du sport ; nous avons dû nous familiariser avec des domaines comme la médecine, le dopage et la lutte contre la corruption. Aujourd’hui, nous devons nous intéresser aux mesures prises contre le virus, mais aussi aux aspects financiers du monde sportif » ajoute Marcus Tepper, de l’ARD (Allemagne).
Alors, l’expérience acquise au cours de la crise du coronavirus changera-t-elle définitivement notre façon de travailler dans la radio ? Après les premières tentatives d’organisation de manifestations sportives à huis clos, tous les membres du groupe s’accordent à dire, comme Lars Brøndum Nielsens, que « le sport en direct sans public est vraiment insipide ».
« Nous avons tous vu aujourd’hui la course cycliste Paris-Nice sans la foule », déclare Christophe Mallet. « Vous pouvez penser ce que vous voudrez, mais moi, je trouve que c’était vraiment triste. Dans nos commentaires, dans nos reportages, nous oublions parfois le public. Or, s’il y a une chose qu’il faut garder à l’esprit, c’est la nécessité de remercier le public de sa présence. »
Tous les membres du groupe ont constaté un nouvel esprit de coopération entre les médias et les athlètes, ces derniers se montrant en outre peut-être plus sensibles aux liens qu’ils entretiennent avec le public.
« Les vrais sportifs, les vrais athlètes se sont probablement un peu plus ouverts aux médias », remarque Christophe Mallet. « Je ne dis pas qu’auparavant, nous n’étions pas les bienvenus, mais cela fait chaud au cœur de voir que certains athlètes accueillent désormais plus chaleureusement les journalistes de notre équipe. »
Boštjan Reberšak, de Radio Slovenija Val202, raconte comment une équipe de sauteurs à ski, avec leurs entraîneurs et le personnel, ont livré des repas dans tout le pays, tandis qu’Aleksander Ceferin, le président slovène de l’UEFA, a participé à la livraison de masques. Parallèlement, la skieuse italienne Federica Brignone, lauréate de la Coupe du monde, s’est entretenue avec Manuel Codignoni de la RAI sur sa victoire, remportée alors même qu’elle soignait sa mère, championne de ski dans les années 1970 et malade du Covid-19.
Le modérateur des échanges, Marcus Tepper, conclut : « J’espère que nous allons lancer un débat sur le rôle du sport professionnel dans la société, même en temps de crise. Le sport, et tout particulièrement le sport professionnel, n’est pas essentiel pour faire fonctionner une société. Les personnes qui font marcher le pays sont les médecins, les infirmiers, les employés de supermarchés, le personnel des transports publics, et non les stars du sport ou les footballeurs. Ça fait du bien d’être journaliste aujourd’hui. »
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